Immersion dans le Noir
Par Léo Dauphin
Immersion dans le Noir
9am, immergé jusqu'aux narines, dans un lac frais d'avril, je laisse la lumière du soleil levant devant moi, toucher mon front.
Après le temps nécessaire, je sors et enfile mon poncho de laine pour me diriger vers ce repère sous terre qui pour les prochaines soixante-douze heures suivantes sera mon temple.
Ayant au préalable avec mon Ange du noir, pris connaissance de l'espace, ces commodités et établie la ligne directrice du séjour, sans hésitation, je ferme la porte derrière moi et éteins la lumière pour me plonger dans un noir total.
Plongé dans ce silence obscur, rapidement, un sentiment de reconnaissance grandit en moi. Au plus profond de moi j'entends, enfin.
Allongé au sol, je laisse mon corps libérer les énergies stockées que l'immersion en eaux froides, cette médecine que je porte en moi a activé.
En toute humilité et dans le lâcher-prise, j'accueille avec gratitude les tremblements et expressions sonores diverses que mon corps physique a besoin de vivre. S'en suis évidement, un relâchement physique qui, bien couché sur le tapis qui couvre le plancher chauffant, m'endort.
Après un instant, sans aucun repère de temps, j'étire mon corps pour ensuite m'assoir en plein centre de la grotte sombre et débute ce voyage sans stimuli.
Déposé, avec une assise droite et solide, j'observe. Dans le noir et le silence, j'observe avec aisance mon intérieur. Sans perturbation, mon mental s'apaise et débute son ménage, passant en revue les résidus des derniers mois. Ce qui me guide, vers une respiration holotropique profond soutenue, pas un rythme chamanique proposé dans la Chambre noire.
De retour de cette transe respiratoire, j'ouvre les yeux, rien, que du noir. Mais que cadeaux, je murmure le sourire au visage et je m'endors à nouveau. Cette fois-ci dans un espace accommodé à cette fin avec des coussins.
Au loin, probablement plusieurs heures plus tard, j'entends mon nom et un délicat toc-toc à la porte.
C'est l'ange du noir venant au petit matin s'assurer que tout ce passe bien et que je ne manque de rien.
Étant en jeûne, je n'ai besoin seulement que de l'eau quelle m'apporte et laisse à l'extérieur dans un espace attitré à cette fin pour éviter les contacts et surtout la lumière du jour.
Je lui réponds que tout va très bien et rapidement replonge dans un sommeil plus profond encore.
Cette deuxième journée est floue.
J'ai navigué en respiration consciente, les yeux grand ouverts, le monde du rêve.
Fixant l'obscurité, jusqu'à ce qu’à nouveau, j'entende au loin mon nom et un délicat toc-toc.
Une journée à passé, je n'ai pas bu une goute d'eau, je ne sais où je me situe dans l'espace, mais je me sens profondément bien et calme. Je réponds donc à l'ange du noir que tout va bien et que si possible, j'aimerais avoir une infusion chaude.
Quelques minutes, j'imagine, elle m'apporte une infusion de Chaga que doucement, j'apprécie.
Cette troisième journée fut plus active. Breathwork, méditation, repos et didgeridoo, composa ma journée. Ce cycle de pleine présence sans stimuli autre que mon être, répété, me plongea à un certain moment dans un shavasana en plein centre de l'espace.
À chaque expiration je pouvais sentir mon corps s'enfoncer dans le sol et à chaque inspiration une partie de mon existence, s'élever.
Fasciné par cette sensation, je m'y abandonne. Sans aucun repère, je me sens tombé dans un vide.
De ce doux vide, apparait une lumière blanche. Une lumière pulsée prend toute sa place. J'ouvre donc mes yeux, ils sont déjà ouverts. Sans résistance, je me laisse bercer par ces douces pulsations qui font vibrer mon âme.
Rien de spectaculaire ne ce passe vraiment, seulement cette nouvelle réalité que j'accueille et mon corps physique qui n'est plus d'aucune importance.
Mon corps éthérique tant qu'a lui prend de l'expansion. Dans cette expansion, je peux ressentir l'amour venant de la source.
Toc-toc, Léo !
L'ange du noir qui vient soixante-douze heures plus tard me porter une chandelle pour progressivement revenir à la réalité du monde terrestre.
En sursaut, je lui nomme que je ne suis pas encore rendu à sortir...
Elle me dit donc, prend ton temps, je reviens d'ici trente minutes.
Après avoir partagé avec elle mon état et toute ma gratitude, je sors tranquillement de la grotte pour entendre le son du ruisseau, des oiseaux, déjeuner et laisser mes yeux rapprivoiser la lumière du jour.
Bien de retour dans mon corps et ancré sur cette terre, remerciant les lieux, je prends doucement la route avec cette vibration en expansion.
Gratitude infinie pour ce lieu vibrant et attentionné qui facilite cette expérience unique.
Un premier contact en douceur avec cette médecine puissante qu'est l'immersion dans le noir.
28 avril 2024